11.07.2024

Pas d’abus de majorité en cas de décision prise à l’unanimité

Une nouvelle jurisprudence sur l'abus de majorité

La Cour de cassation juge pour la première fois qu’une décision prise à l’unanimité des associés ne peut pas être constitutive d’un abus de majorité.

Le dirigeant et associé majoritaire d’une société par actions simplifiée (SAS) ainsi que sa compagne, associée minoritaire, concluent une promesse de cession de la totalité des actions de la société au profit d’un tiers.

Peu de temps avant la réitération de la promesse, l’assemblée générale de la SAS décide, à l’unanimité, d’octroyer une prime exceptionnelle de 83 000 € au dirigeant.

Après la cession, ce dernier agit contre la SAS en paiement de cette prime que l’acquéreur, qui en est devenu le nouveau dirigeant, refuse de lui verser.

La SAS et l’acquéreur demandent alors l’annulation pour abus de majorité de l’assemblée générale ayant attribué la prime.

Ils soutiennent que l’existence d’une décision prise au détriment des associés minoritaires doit être appréciée objectivement et peut exister nonobstant le vote des minoritaires en faveur de la délibération sociale litigieuse.

La Cour de cassation écarte l’argument et rejette la demande en annulation de l’assemblée, au motif qu’une décision prise à l’unanimité des associés d’une société ne peut pas être constitutive d’un abus de majorité.

Rappel : il y a abus de majorité lorsque la décision adoptée par le ou les associés majoritaires est contraire à l’intérêt social et a été prise dans l’unique dessein de favoriser les membres de la majorité au détriment des autres associés.

Au cas particulier, la cour d’appel avait jugé que l’adoption à l’unanimité de la décision critiquée à laquelle avait participé l’associé minoritaire empêchait de considérer qu’elle avait été prise au détriment de l’associé minoritaire. Il est permis de penser que ce raisonnement justifie la solution retenue par la Cour de cassation, même si celle-ci ne l’a pas explicitement repris dans sa décision. Il en résulte, à notre avis, que la solution ne s’applique que si la décision a été prise à l’unanimité de tous les associés et non pas uniquement de ceux qui étaient présents ou représentés à l’assemblée.

Source : Cass. com. 8-11-2023 n° 22-13.851 F-B