03.10.2024

Franchise, GMS : soutien abusif d'un franchiseur ?

Un franchiseur qui accorde des délais de paiement à son franchisé dans des conditions normales ne fait pas de soutien abusif.

Dans ce dossier qui concerne la GMS, le franchiseur issu de la région stéphanoise, accorde à son franchisé, exploitant d’une supérette ,un crédit sur le stock lors de la reprise du fonds de commerce du prédécesseur.

Après moult difficultés, réétalement, renégociation du crédit vendeur, en prêt avec un taux d'intérêt raisonnable, le franchisé se place sous la protection du tribunal de commerce avec une procédure qui se conclut finalement par une liquidation judiciaire.

Derrière, considérant qu'il y a un « soutien abusif », le liquidateur assigne le franchiseur en justice, en lui réclamant 575 000 € de dommages et intérêts pour le préjudice subit.

Selon le liquidateur la société franchisée a été victime du soutien abusif de son enseigne qui, par ses interventions, a « contribué à prolonger artificiellement l'activité déficitaire de la société franchisée au détriment de la collectivité des créanciers ».

Rappelons tout d'abord que le contexte de soutien abusif dans le contexte des franchisés se caractérise comme suit :

  1. Le soutien abusif fait généralement référence à une situation où un franchiseur continue de soutenir financièrement un franchisé en difficulté, alors qu'il est clair que ce dernier n'a aucune chance de redresser sa situation.
  2. Ce concept est lié à la responsabilité du franchiseur envers son réseau et les tiers (comme les créanciers du franchisé).
  3. Les tribunaux examinent généralement plusieurs facteurs pour déterminer s'il y a eu soutien abusif, comme la connaissance par le franchiseur de la situation irrémédiablement compromise du franchisé, la durée et l'ampleur du soutien, et les conséquences pour les autres parties prenantes.

Au cas d’espèce, et confirmant le jugement en première instance, les juges déboutent la liquidation de sa demande.

Pour ce faire il se base sur les éléments suivants :

  • Les crédits vendeurs devenus des prêts ont été accordés à des conditions normales de marché, et non à des taux prohibitifs ou usuraires ;
  • Lorsqu’ils ont été accordés, rien de démontrait que la situation de la société franchisée était irrémédiablement compromise.
  • De même à aucun moment le franchiseur ne s’est immiscé dans la gestion au sens de l'article L 650-1 du Code de Commerce, pas plus qui n'a demandé de garanties disproportionnées
  • Enfonçant le clou, les magistrats relèvent qu’il n’y a pas eu immiscion dans la gestion mais une simple assistance commerciale au franchisé conformément d'ailleurs au contrat de franchise.
  • Enfin la Cour note l'absence de fraude, « le seul fait d’étaler le paiement de ses créances dans le but de maintenir l'activité du débiteur, pour en être payé ne caractérise pas une fraude. Et le franchiseur n'a utilisé ni moyens déloyaux, ni tenté d'échapper à aucune disposition légale par ailleurs.

Bref ni immiscion dans la gestion, ni fraude, des prêts dans des conditions normales : c'est à bon droit que les juges de première instance ont débouté le liquidateur judiciaire de ses demandes !

Source : CAA Angers du 02/04/2024, N°22/01817