Abus de droit caractérisé même en présence d’un montage inutile
Dans une affaire, deux contribuables avaient apporté l’intégralité des parts d’une société française qu’ils détenaient à une société luxembourgeoise créée pour l’occasion. Par cette interposition, ils ont ainsi pu distribuer des dividendes à la société luxembourgeoise, réduire le capital de la société française au profit de la société luxembourgeoise puis réduire le capital de la société luxembourgeoise afin d’appréhender une somme de 3.2 M€ en exonération d’impôt.
Selon l’article L. 64 du Livre des Procédures Fiscales, l’administration fiscale est en droit d’écarter, comme ne lui étant pas opposables, les actes constitutifs d’un abus de droit, soit que ces actes ont un caractère fictif, soit que, recherchant le bénéfice d’une application littérale des textes ou de décisions à l’encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n’ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d’éluder ou d’atténuer les charges fiscales que l’intéressé, si ces actes n’avaient pas été passés ou réalisés, auraient notamment supportées eu égard à sa situation ou à ses activités réelles.
Dans le cas présent, l’administration fiscale avait donc estimé que la société luxembourgeoise était dépourvue de substance économique réelle et que son interposition présentait le caractère d’un montage artificiel afin de permettre aux associés de s’approprier en franchise d’impôt le produit de la cession des actifs de la société française via la holding luxembourgeoise.
L’abus de droit ne peut être reconnu qu’en présence d’un gain fiscal. Le contribuable soutenait donc qu’il n’y avait pas eu de gain fiscal puisqu’il aurait eu la possibilité d’arriver au même résultat fiscal avec un rachat par la société française de ses propres titres suivi de leur annulation.
Le Conseil d’Etat a donné raison à l’administration fiscale en considérant que le fait que le contribuable aurait pu réduire l’imposition de manière identique en faisant le choix de passer ou de réaliser d’autres actes que ceux qualifiés d’abusifs n’était pas de nature à faire obstacle à ce que soient écartés comme procédant d’un abus de droit des actes passés ou réalisés dans le seul but d’atténuer la charge fiscale supportée par le contribuable.