07.02.2019

TVA : déduction possible en cas d’absence de facture ?


Elles concernent :

  • les biens ou les services doivent être utilisés par l’assujetti pour la réalisation de ses opérations taxées ;
  • les biens ou les services doivent lui être fournis par un autre assujetti.

Des conditions formelles du droit à déduction sont posées par l’article 178 a de la directive TVA : détention d’une facture conforme aux dispositions de la directive.

Ces dispositions européennes sont transposées en France à l’article 271, II-1-a et 2 du CGI.

La doctrine administrative indique d’ailleurs que la facture constitue un document fondamental pour l’exercice du droit à déduction et que le fait de ne pas être en possession de la facture d’achat mentionnant la TVA fait obstacle à l’imputation de cette taxe.

Dans le même sens, le Conseil d’Etat refuse tout droit à déduction de la TVA en l’absence de facture, la production d’autres documents ne constituant pas des factures ne pouvant suppléer à cette absence.

Jusqu’à récemment, la CJUE considérait également que l’exercice du droit à déduction était normalement lié à la possession de l’original de la facture ou du document en tenant lieu.

Néanmoins, la CJUE vient de juger plusieurs fois que le principe fondamental de neutralité de la TVA exige que la déduction de la taxe d’amont soit accordée si les conditions matérielles sont satisfaites, même si certaines conditions formelles ont été omises par les assujettis.

Dans un premier temps, elle indiquait que l’administration fiscale ne saurait refuser le droit à déduction de la TVA au seul motif que la facture détenue par l’assujetti n’a pas été établi conformément à l’article 226 de la directive TVA (du fait de l’omission ou de l’inexactitude de certaines mentions devant y figurer en vertu de cet article) dès lors qu’elle dispose de toutes les informations nécessaires pour vérifier que les conditions de fond relatives à ce droit sont satisfaites (CJUE, 15 septembre 2016, Barlis 06 et Senatex).

Dans l’arrêt du 21 novembre 2018 (Lucreţiu Hadrian Vădan), la CJUE va plus loin en considérant que l’absence de production de la facture d’achat elle-même, qui ne constitue qu’une exigence formelle du droit à déduction, ne saurait entraîner le refus du droit à déduction de la TVA correspondante, si l’assujetti établit que les conditions matérielles de ce droit sont satisfaites. L’application stricte de ce principe se heurterait pour la CJUE aux principes de neutralité et de proportionnalité en ce qu’il aurait pour effet d’empêcher de manière disproportionnée l’assujetti de bénéficier de la neutralité fiscale afférente à ses opérations.

Pour obtenir son droit à déduction sans produire de facture, l’assujetti devra fournir des preuves objectives que les biens ou les services en cause lui ont effectivement été fournis en amont par des assujettis, pour les besoins de ses propres opérations soumises à la TVA, et qu’il s’est effectivement acquitté de la taxe correspondante.

La CJUE indique que ces preuves peuvent se trouver en possession des fournisseurs ou des prestataires auprès desquels l’assujetti a acquis les biens ou les services pour lesquels il a acquitté la TVA en cause. Il semblerait que ces preuves puissent être des pièces détenues par l’assujetti déducteur.

La CJUE n’a pas précisé quelles pouvaient être ces pièces susceptibles de constituer des preuves objectives du bien-fondé du droit à déduction.

On peut penser qu’en constituent notamment les duplicatas ou copies de la facture originale, une facture reconstituée après-coup, une attestation du fournisseur ou d’un notaire, un bon de commande, un justificatif de paiement, un devis, un bon de livraison, un contrat...

Il faudra observer les commentaires de l’administration fiscale française à ce sujet dans sa doctrine ainsi que les décisions à venir du juge national sur ce point.

Source : directive TVA n°2006/112/CE du 28 novembre 2006 ; BOI-TVA-DED-40-10-10.