08.06.2015

Auto-entrepreneurs : gare à la requalification en contrat de travail


Dans un contexte économique difficile, la tentation est forte pour les employeurs de repenser leurs relations de travail en faisant notamment appel à des travailleurs non salariés.

Lorsqu'une personne physique ou morale est régulièrement immatriculée au répertoire des métiers (pour les artisans), au registre du commerce et des sociétés (pour les commerçants et les mandataires), à des registres professionnels (comme le registre des transporteurs) ou affiliée auprès des organismes sociaux en qualité de travailleur indépendant (cas notamment des auto-entrepreneurs), le principe juridique de présomption simple de travail indépendant et d'absence de contrat de travail s'applique.

Pour autant, cette présomption de non-salariat de l'auto-entrepreneur ne constitue qu'une présomption simple, qui peut être remise en cause lorsqu'un lien de subordination entre le donneur d'ordre et l'auto- entrepreneur est établi.

A cet égard, une Réponse ministérielle de 2013 (Rep. Min. n° 7103, JO AN du 6 août 2013) a listé un certain nombre d'indices permettant de caractériser l'existence d'une relation de travail salariée :

  • l'initiative même de la déclaration en travailleur indépendant (démarche non spontanée, a priori incompatible avec le travail indépendant),
  • l'existence d'une relation salariale antérieure avec le même employeur, pour des fonctions identiques ou proches,
  • un donneur d'ordre unique,
  • le respect de consignes autres que celles strictement nécessaires aux exigences de sécurité sur le lieu d'exercice, pour les personnes intervenantes, ou bien pour le client, ou encore pour la bonne livraison d'un produit,
  • une facturation au nombre d'heures ou en jours,
  • une absence ou une limitation forte d'initiatives dans le déroulement du travail,
  • une absence ou une limitation forte d'initiatives dans le déroulement du travail,
  • l'intégration à une équipe de travail salariée,
  • la fourniture de matériels ou équipements (sauf équipements importants ou de sécurité).

Par application de ce faisceau d’indices, les juges ou les services de contrôle de l’URSSAF et de l’Inspection du travail peuvent ainsi requalifier la relation en contrat de travail.

A l’occasion d’un arrêt du 6 mai 2015, la Cour de cassation a fait application de ce faisceau d’indices pour requalifier en contrat de travail la relation entre une société de géothermie et un auto-entrepreneur.

Les Juges du fond, saisis d’une demande de requalification de la mission en contrat de travail, avaient rejeté celle-ci au motif d’une part que l’auto-entrepreneur avait refusé de se rendre à une foire d’exposition et d’autre part que la société émettait des factures en contrepartie de la réalisation des prestations par l’auto-entrepreneur.

Les Juges de la Haute Cour caractérisent néanmoins une relation de travail salarié, en relevant notamment que l’auto-entrepreneur était tenu de respecter le planning quotidien imposé par la société, qu’il avait l’obligation d’assister à des entretiens individuels et des réunions commerciales, qu’un objectif annuel en chiffre d’affaire lui était imparti et enfin qu’il devait passer les ventes selon une procédure définie unilatéralement par la société.

Source : cassation sociale du 6 mai 2015, n°13-27.535.